9 septembre 2015

Autofictions sympathiques

Oui, vous avez bien lu. J'ai changé le titre de ce blogue : Chroniques autofictives et sympathiques. J'écrirai maintenant de l'autofiction, ou rien du tout. Dès lors, nul besoin de justifier tel passage, tel fragment de vie ou telle tranche de mon quotidien. Vous ne lirez que la singulière alchimie entre ma vie et mes envies, mes lectures et mes rêves. Rien de plus, rien de moins. Le sort en est jeté.

Ce matin, avant même que l'aurore aux doigts (ou aux pieds) rosés ne se lève, je peaufinais un dossier de lecture sur un roman policier. Déterminée à faire aimer la lecture à mes élèves, chaque petit détail jouait un rôle crucial dans ma planification. Un seul mot dans la formulation d'une phrase pouvait définitivement tout changer.

Lorsque la maison jaune s'éveilla avec les bruits de l'espresso bouillonnant, des pâtes frémissant pour la boîte à lunch ou encore avec une première brassée matinale, je réalisai que mon fils était bouillant, frémissant et le coeur tout embarrassé. Après la première éclaboussée dans la salle de bain, je compris que je passerais la journée avec lui à la maison. C'est ainsi que je profitai d'un peu de temps pour lire. Voler du temps, entre deux câlins, entre deux étreintes pour soutenir les douleurs et les vomissements. 

Je commençai donc à lire une oeuvre de Victor Lévy-Beaulieu, Désobéissez!. Lente et progressive plongée dans un monde inconnu. Découvertes insoupçonnées, malgré des détours forcés.  Joie de lier ses pensées à celles de Thoreau, Gandhi et autres réformateurs de ce monde. Car réformer cette société des maux qui la tenaillent, voilà bien qui hante une partie de mes pensées. Comme chaque fois que je retrouve à la maison pour un congé forcé avec un enfant souffrant, je songe à quitter la profession pour prendre la soutane familiale. Renouer avec la candeur de l'enfance. Renouer avec une éducation digne des traditions les plus rigoureuses et formatrices pour le corps et l'esprit. Nourrir le muscle de l'âme, celui que l'on oublie trop souvent sur les bancs d'école, trop occupés que nous sommes à comptabiliser connaissances et compétences. 

Et puis, comble de l'imprévu, moi qui ne pensais qu'à plonger au creux de mes pensées, un appel téléphonique me sortit des songes et des brumes. L'enseignante de mon enfant. Car mon enfant n'est pas comme les autres. Croyant que le discours de l'autorité est ennuyant, il construit des châteaux de cartes, des constructions de crayons, des avions en papier, des bateaux naufragés, des monstres affrontant tous les dangers et mille jeux infiniment plus intéressants les uns que les autres. Défiant consignes et règles, l'école telle qu'elle est aujourd'hui ne lui convient pas. Je l'avais bien pressenti, il y a déjà longtemps, mais même dans les écoles dites alternatives, nouvelles et différentes, règne une sélection insidieuse. Lors d'une entrevue, moi et M. n'avions à réussi à convaincre les « juges » que notre enfant devait recevoir une éducation plus libre et plus axée sur ses besoins spécifiques. Voilà donc qu'il se retrouve dans un système qui l'exclut et qui attend seulement un diagnostic qui confirmera ses observations. Un diagnostic qui permettrait l'administration de médicaments. Une simple pilule. Tout deviendrait parfait, lisse, calme et sans saveurs. Ouais. Mais l'enseignante me rassure, bien sûr, c'est la noblesse du corps professoral, en me disant que nous trouverons des solutions avant d'en arriver à la médication. Respirer pour ne pas sombrer.

Je reviens à ma lecture. Je reviens à mon enfant, l'entourant de mes bras du mieux que je le peux. C'est tout ce que je puisse faire, pour l'instant. Et écrire, pour ne pas faire naufrage, surtout. Hurler en silence.

Digression salutaire.

« Peut-être devons-nous désormais, comme nous le proposent les artistes contemporains, réinterpréter la famille, la religion, la croyance, la politique. Ce dont nous nous sommes habilement débarrassés, désencombrés, afin de se retrouver au bout du compte devant le vertige du rien, du néant blanc. Puisque la postmodernité est une maladie ayant infecté, comme toute grande idéologie, à peu près toutes les sphères de notre vie courante, du moins ici, en Occident. De la famille jusqu’à la politique. Peut-être ne nous reste-t-il plus qu’à réinterpréter ce que nous connaissons déjà. Ces idées qui ont déjà fait leurs preuves et donné des fruits. C’est quelque chose qui mérite probablement d’être exploré. » 
MOUTIER, JOURNAL D'UN ÉTUDIANT EN HISTOIRE DE L'ART

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